Dans la mythologie nordique, les chevaux sont souvent représentés comme de puissants destriers accompagnant les dieux dans leurs aventures épiques. Pourtant, il existe un cheval bien plus sinistre et incarnant la déchéance : Helhest. Selon les légendes danoises, cette créature mystérieuse à trois jambes se cache au plus profond des ténèbres. Par ailleurs, il est étroitement lié à Hel, la déesse des morts et gardienne du royaume d’Helheim, puisqu’il est sa monture légendaire.
L’origine d’Helhest, le cheval fantôme
En vieux norrois, Helhest ou Helhestr signifie « cheval des enfers » ou « cheval de Hel« . Ce cheval sinistre est mentionné dans différentes sources de la mythologie nordique, même s’il est moins connu que certains autres chevaux divins tels que Sleipnir ou Gullfaxi.
- Edda poétique : cette collection de poèmes fait de nombreuses références à Hel et au royaume d’Helheim. Helhest y apparaît succinctement comme monture de la déesse de la mort.
- Edda de prose : Snorri Sturluson fait mention de Hel et de son royaume des morts, en incluant également de manière brève Helhest.
Certaines sagas islandaises contiennent par ailleurs des éléments concernant le cheval des enfers et la déesse des morts. Aussi, Helhest est indissociable d’Hel, à qui il sert de destrier pour réaliser ses quêtes épiques.
D’autre part, ce cheval fantôme est mentionné par Jacob Grimm dans son étude de la mythologie teutonne. Il est donc une légende notable dans le folklore du Danemark et du Schleswig.
Dans le Dictionnaire infernal
En 1845, Jacques Collin de Plancy écrit dans son dictionnaire infernal :
« La mythologie scandinave donne le pouvoir de la mort à Héla, qui gouverne les neuf mondes de Niflheim. Ce nom signifie mystère, secret, abîme. Selon la croyance populaire des paysans de l’antique Cimbri, Héla répand au loin la peste et laisse tomber tous les fléaux de ses terribles mains en voyageant, la nuit, sur le cheval à trois pieds de l’enfer, Helhest. Héla et les loups de la guerre ont longtemps exercé leur empire en Normandie, cependant, lorsque les hommes du Nord, de Hastings, devinrent les Normands de Rollon, ils semblent avoir perdu le souvenir de leurs vieilles superstitions aussi rapidement que celui de leur langue maternelle. »
En 1846, le prêtre catholique français Jean-Paul Migne cite la même histoire dans son Encyclopédie théologique.
Helhest, sa représentation dans la mythologie nordique
Dans le folklore viking, Helhest est représenté comme une créature macabre et terrifiante. Sa stature est loin d’être aussi majestueuse et imposante que les autres chevaux légendaires accompagnant les dieux.
Un cheval cadavérique
Helhest est un cheval déformé car, il ne possède que trois jambes squelettiques. Son pelage comme sa peau sont si fins, qu’il semble être translucide, laissant apparaitre son ossature saillante. Sa crinière est parsemée, en lambeaux, et d’un gris clair faisant penser à une toile d’araignée flottant dans le vent. Son crâne est enfoncé et ses yeux sont injectés de sang. Helhest est donc un cheval cadavérique, ce qui lui a d’ailleurs valu le surnom de « cheval cadavre« .
Un animal putride et terrifiant
Par ailleurs, dans les croyances vikings, Helhest est décrit comme étant toujours suivie d’une nuée de mouches. Il dégage en effet une odeur putride et de mort qui le suit dans chacun de ses pas. Des pas sinistres et parfaitement identifiables qui provoquent la terreur. Il est également raconté que dès qu’une mouche touche sa peau en décomposition, elle tombe raide morte à terre.
Chevaucher cet animal décharné est comme s’assoir sur un tas d’asticots et sur un sac d’os qui craquent sans cesse. Ainsi, pour monter sur son dos, Hel doit prendre appui sur ses côtes qui dépassent de son corps cadavérique.
La légende du Helhesten
D’après un mythe danois, une légende émerge sur l‘Helhesten, le cheval du royaume des morts. Dans un village reculé des terres nordiques, une église devait être construite. Or, sous la terre de la future construction de l’édifice religieux, est enterré un cheval vivant à qui l’on a coupé une patte afin qu’il ne puisse pas s’échapper. Ainsi, la légende raconte qu’une créature sinistre rôde dans les cimetières en quête d’âmes damnées et annonçant la mort aux pauvres mortels croisant sa route.
Cette créature, connue sous le nom de Helhesten, était le cheval de Hel, la déesse des morts de la mythologie nordique. Il apparaît chaque nuit, galopant silencieusement dans la brume. Sa présence annonce la mort et la désolation et les villageois le craignent terriblement. Certains disent même l’avoir aperçu par une nuit sans lune. Rôdant près de l’église, ses yeux brillants d’une lueur sinistre dans l’obscurité et murmurant des malédictions et des paroles de désespoir.
Les cathédrales d’Århus et de Roskilde
Toujours d’après cette légende danoise, un homme aurait aperçu un cheval seul rôdant près de la cathédrale d’Århus. Il demande alors autour de lui quel est cet animal et un étranger lui répond « c’est le Helhest ». A peine a-t-il prononcé ses mots qu’il mourut peu de temps après. Une croyance danoise raconte également qu’à la cathédrale de Roskilde se trouve une pierre sous laquelle serait enterré le cheval des enfers. Les visiteurs s’arrêtaient alors pour y cracher dessus et conjurer les malédictions.
Le Schleswig
Le duché de Schleswig compte également beaucoup d’histoires sur le sinistre cheval fantôme. Le peuple danois le redoutait et le craignait chaque nuit. La légende raconte en effet qu’en temps de peste, la déesse Hel rôdait durant la nuit sur un cheval à trois jambes, pour y répandre la maladie et étrangler les hommes.
La balade de Bedeblack
Cette balade danoise du Moyen-Âge évoque le destin de Bedeblack, (un cheval fantôme ou encore le fils d’un roi transformé en cheval par sa belle-mère). Il est envoyé en cadeau au roi du Danemark parmi une troupe de chevaux magnifiques. Mais, Bedeblack est si majestueux, qu’il est nourri avec le meilleur avoine danois. Or, le roi du Danemark doit partir en guerre et laisse la garde du cheval à sa femme en lui demandant d’en prendre grand soin.
Hélas, la reine le prive de nourriture, l’emprisonne et essaie même de le tuer. Par chance, Bedeblack réussit à s’échapper et sera aperçu par le roi durant son voyage retour. Cependant, sous les yeux de son maître, le cheval tombe raide mort sur la rive. Profondément affecté par cette perte, le roi du Danemark décide de l’enterrer avec tous les honneurs.
Helhest, Compagnon légendaire de la déesse Hel
Même si dans certaines légendes scandinaves Helhest est représenté monté par la Mort elle-même, ce cheval fantôme est surtout décrit comme la monture de la déesse Hel.
Un cheval fantôme psychopompe
Dans la mythologie nordique, Hel est la fille du dieu Loki et est représentée comme la déesse de la mort. Helhest, comme son nom l’indique, est sa monture légendaire. Il erre dans les cimetières au plus profond de la nuit pour chercher les morts qui ne peuvent rejoindre le Valhalla, la demeure du dieu Odin. Cheval psychopompe, il les guide alors vers leur destination finale : le royaume d’Helheim. Ainsi, dans les profondeurs sombres et silencieuses du royaume des morts, Helhest accompagne sa cavalière Hel.
La symbolique d’Helhest, le cheval des enfers
Helhest, ou « cheval de Hel », revêt une symbolique profonde dans la mythologie nordique. Celle-ci est associée à la mort, à la destinée et à la transition entre la vie et l’au-delà.
La mort et le mystère
Considéré comme la monture de la déesse Hel, Helhest est intimement lié à la mort et au mystère. Sa présence est souvent un mauvais présage et engendre même le décès brutal de ceux qui croisent sa route. Ainsi, il symbolise la force inéluctable de la mort dans l’existence de chaque être vivant.
Par ailleurs, ce cheval des enfers incarne le mystère car, les mythes sont nombreux à son sujet. Il est en effet entouré de superstitions créant la peur et la terreur chez les mortels.
L’Au-delà et la destinée
Selon la croyance danoise, Helhest est considéré comme un messager de la destinée. Il annonce la maladie, la déchéance et la mort en parcourant les cimetières. Aussi, il rappelle aux hommes la fragilité de leur existence et la nécessité d’accepter leur destin avec résignation et bravoure.
D’autre part, Helhest symbolise la transition vers l’Au-delà en guidant les âmes vers le royaume de la déesse Hel. Une transition associée à la notion de voyage spirituel et de l’élévation de l’âme après la mort.
Helhest dans la culture populaire moderne
Présent dans la culture populaire moderne, Helhesten était le titre d’une revue d’art danoise active dans les années 1940, qui est devenue une plateforme importante pour l’art expérimental danois. De plus, Helhesten était également le titre de l’essai à peine dissimulé de « cheval à trois pattes » écrit par l’auteur et historien d’art : Paul Vads.
0 commentaires